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Protection de l'enfance

25/11/2021

L’évaluation en protection de l’enfance, le comment ?

Bastian Besson

L’évaluation en protection de l’enfance, le comment ?

La loi du 14 mars 2016 et plus précisément le décret 2016-1476 du 28 octobre 2016 vise à pouvoir clarifier la notion d’évaluation des situations de danger ou risque de danger.

Dans cette optique, la HAS a publié en janvier 2021 le premier cadre national de référence dans la continuité de la stratégie nationale de prévention et de protection de l’enfance 2020-2022 et du plan interministériel de mobilisation et de lutte contre les violences faites aux enfants 2020-2022.

Dans cet article, nous allons préciser les contours de l’évaluation à travers ses éléments de langage mais aussi en termes de méthodologie évaluative.

 

 

L’évaluation au cœur des dispositions législatives récentes

En effet, la question de l’évaluation figure au cœur des derniers textes législatifs en protection de l’enfance et dans différents rapports parlementaires qui pointent tous l’absence d’outils partagés à l’échelle nationale et ce malgré, la création des Cellules Régionales d’Informations Préoccupantes (CRIP) en 2007.

En recentrant les missions autour de la notion de l’intérêt supérieur de l’enfant, la loi du 16 mars 2016 souligne que la protection de l’enfance « vise à garantir la prise en compte des besoins fondamentaux de l’enfant : elle doit soutenir son développement physique, affectif, intellectuel et social et préserver sa santé, sa sécurité, sa moralité et son éducation, dans le respect de ses droits »[1]

C’est dans cette optique qu’un changement de paradigme doit s’opérer en passant d’une culture du risque à une approche centrée sur les besoins de l’enfant.

Mais avant de rentrer plus en amont dans la démarche, tentons de clarifier une certaine terminologique spécifique dés l’instant où l’on aborde la question de l’enfance en danger.

 

 

Un cadre terminologique commun

Dans son préambule, le référentiel HAS apporte des précisions sur la notion de danger mais également sur certaines spécificités des maltraitances infantiles.

La notion de danger ou risque de danger est définit principalement au regard de la réponse aux besoins fondamentaux de l’enfant et notamment sur le plan du développement et de la santé physique et/ou psychique.

Dans cette qualification, la notion de danger grave et immédiat apparait également à travers le degré de réaction qu’elle amène, à savoir une action immédiate et sans délai qui engage le Président du Conseil Départemental à alerter le procureur de la République au-delà du timing de l’évaluation.

Le rôle de la CRIP est donc de pouvoir déterminer le caractère préoccupant des informations qu’elle reçoit, d’en apprécier le niveau de danger à travers les facteurs de facilitation ou de compromission des besoins et de donner des indications quant aux suites à donner.

La notion de maltraitance réapparait également dans le vocabulaire législatif et notamment à travers la définition formulée dans le cadre de la « démarche de consensus sur les besoins fondamentaux de l’enfant » en 2017 :

« Il y a maltraitance d’une personne en situation de vulnérabilité quand un geste, une parole, une action ou un défaut d’action compromet ou porte atteinte à son développement, à ses droits, à ses besoins fondamentaux et/ou à sa santé et que cette atteinte intervient dans une relation de confiance, de dépendance, de soin ou d’accompagnement. Les situations de maltraitance peuvent être ponctuelles ou durables, intentionnelles ou non ; leur origine peut être individuelle, collective ou institutionnelle. Les violences et les négligences revêtent souvent des formes multiples et associées au sein de ces situations »

Mais au-delà de cette définition somme toute générale, les différentes formes de violences sont caractérisées en lien avec la littérature internationale qui élargit le spectre de la maltraitance, à savoir :

  • Les violences physiques
  • Les violences sexuelles
  • Les violences psychologiques
  • Les négligences
  • L’exploitation/la traite
  • L’exposition aux violences conjugales
  • Les maltraitances institutionnelles

Engager une démarche évaluative nécessite donc le partage d’un vocabulaire commun, via la caractérisation de la situation, avant de pouvoir définir avec précision une stratégie évaluative.

 

 

La caractérisation de la situation

Le référentiel HAS propose une base méthodologique d’intervention afin de structurer la démarche d’évaluation et de caractérisation, cette dernière se décomposant en 3 étapes : l’observation, l’évaluation et l’analyse.

L’observation permet de repérer les signes d’alerte en lien avec des repères sur le développement attendu de l’enfant/l’adolescent au regard de son âge et de son stade de développement.

Elle permet également d’élargir la question de la maltraitance sur d’autres aspects tels que la question du handicap reconnus par la MDPH, une cause médicale ou bien des situations plus ponctuelles (un deuil, une situation de stress ponctuelle, une perte d’emploi…) mais prend aussi un aspect préventif puisque la situation des autres enfants présents au domicile est également observée.

L’évaluation sert à apprécier le degré du risque ou du danger sur 5 domaines déclinés, en sous domaines, en items, et en question permettant de guider les évaluateurs dans leur questionnement. Ces domaines sont les suivants :

  • Développement, santé physique et psychique de l’enfant/adolescent
  • Scolarité et vie sociale
  • Relations de l’enfant/adolescent avec la famille et les tiers
  • Contexte de vie
  • Réponse des parents aux besoins de l’enfant/adolescent

L’analyse permet de rassembler les éléments, d’en dégager les éléments principaux et éventuellement de la partager avec les parents et l’enfant.

A l’issue de la démarche, une conclusion vient finaliser la caractérisation de la situation tout en indiquant un ensemble de préconisations sur les suites à donner, à savoir le classement de la situation, des actions préventives au titre de la protection de l’enfance ou bien celles relevant du droit commun ou le signalement à l’autorité judiciaire.

 

 

Cette méthodologie renouvelée de l’évaluation amène l’ensemble des acteurs qui exercent cette mission à utiliser ce référentiel afin de pouvoir l’intégrer à leurs pratiques existantes.

De par leurs expertises, leurs compétences et le réseau qu’elles ont su tisser à l’échelle des territoires, les CREAI peuvent être un bon point d’appui à l’appropriation et à la mise en œuvre de ce nouveau référentiel et plus largement une offre de formation qui permet d’aborder toute ou partie des sujets traités par ce référentiel.

 


 

[1] Article L112-3 du CASF

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